C'est une très, très grosse affiche ce soir à l'Electric Ballroom, avec non seulement en tête d'affiche un Rolo Tomassi en terre conquise, qui après un nouvel album absolument massif, est attendu de pied ferme par une horde de fans. Mais avec également Heriot pour ouvrir le bal, qui sont quant à eux aussi très attendu par le public londonien, surtout après leur annulation en première partie de Zeal and Ardor. Faisant la jonction, Holy Fawn assure une transition tout en décibels.
Heriot @ The Electric Ballrom, 15 février 2023
La soirée n'est même pas entamée et l'Electric ballrom est déjà presque comble, chose extraordinaire pour une première partie, surtout pour un public londonien timide et parfois un peu boudeur, mais pas ce soir, pas pour Heriot. Groupe venant en partie de Swindon, à mi-chemin entre Bristol et Reading, Heriot c'est la météore métallique britannique de ces trois dernières années. Même le quotidien national The Guardian en parle, c'est dire. Heriot, c'est lourd, c'est gras, c'est oppressant, les qualificatifs ne suffisent parfois plus pour quantifier l'agression sonore dont ils sont responsables. Mais c'est tout ce qu'on aime au final. Toujours est-il qu'ils sont attendus avec impatience ce soir pour déclencher les hostilités. Debbie Gough, la chanteuse du groupe à l'air presque fragile sur cette grande scène, enfin jusqu'à ce que les premiers accords de guitares surgissent et réduisent à néant cette idée absolument ridicule. "Near vision", "Enter the flesh" rugissent et donnent le La. Des titres qui mettent tout le monde d'accord et confirment l'engouement pour ce groupe qu'il va falloir suivre de près. Profound morality donne sur scène un rendu aussi convainquant que sur album, dense, noir et original.
Rolo Tomassi @ The Electric Ballroom, London, Février 2023
Suivant cette avalanche de décibels et d'énergie, Holy Fawn ne donne au public aucun répit, les Américains de Phoenix en Arizona déchargent leur métal avec une constance appliquée. C'est beaucoup moins chaotique que Heriot, beaucoup plus compact, mais également moins entraînant, appelons ça du doom-shoegaze, mais cela ne serait faire justice vraiment à la musique du quatuor. "Candy", "Dark stone", "Arrows", s'égrainent gentiment avec lenteur et dans la pénombre. Pas sûr que le public soit conquis, mais les rangs se sont tout de même resserrés. "Blood pact", marque vraiment l'univers sonore du groupe, avec sa lente exposition, son atmosphère éthérée et ténue. La groupe commence à prendre ces aises légèrement, avant de conclure avec "Death is a relief", "Void of light" et "Seer".
L'Electric Ballroom, c'est l'une des plus grosses salle que Rolo Tomassi a joué, voire la plus grosse en fait. Sciemment conscient de ce fait, le groupe est absolument aux anges et incroyablement reconnaissant du public présent ce soir. Le groupe démarre en douceur avec un "Almost always" qui prépare surtout la suite, et permet au quintet de prendre ces marques sur cette scène un tantinet trop grande, que remplit avec timidité Eva et le reste du groupe. "Cloaked" embraye ensuite rapidement, les choses sérieuses ont bel et bien démarrées, et il est difficile de résister à ce titre phare de l'album, un vrai kaléïdoscope de Rolo Tomassi en 4 minutes à peine tassées. Enchaînant à brûle-pourpoint avec le sublime "To resist forgetting", pas le temps de reprendre son souffle, la foule est sous le charme, en trois titres, c'est plié, Rolo Tomassi a mis tout le monde d'accord. Mais, était-il besoin de convaincre ? Après avoir fait la part belle au dernier album Where myth becomes memory, le groupe puise dans ces deux opus pécédents avec "Rituals", "Opalescent", "Stage knives", "Aftermath", "A flood of light", issus de Grievances et Time will die and love will bury it. Un set assez dense, assez demandeur, surtout pour Eva, où la fatigue accumulée au cours de la tournée se ressent un peu sur cette dernière date. Mais Rolo Tomassi n'en a pas fini avec les hostilités, et récompense l'Electric Ballroom par des titres au combien percutants, "Mutual ruin" et "Prescience", avant de conclure un set évidemment trop court avec l'intense "Drip", qui effectivement dégouline avec délectation et électrise le public insatiable.
Rolo Tomassi était au rendez-vous ce soir, confirmant juste à un public conquis d'avance que cet album Where myth becomes memory est un petit bijou combinant à la fois un mur sonore intense et étouffant et des parties beaucoup plus délicates et aériennes virevoltant avec confiance et maturité.
Merci à Rolo Tomassi et Matt.